Bêtes, chiennes et autres créatures par le Collectif l’Organisation

14 janvier 2012 par nouvellesrepliques

De Luis Enrique Gutierrez Ortiz Monasterio

Avec Michael Maino et Laetitia Lalle Bi Bénie, mise en scène Laetitia Lalle Bi Bénie

Scénographie et son Olivier Mouginot

Intelligence. Voici le mot qui me vient au sortir frais de la séance.

On pénètre dans une ambiance tamisée, mais pas confortable, pas séductrice, un tamisé d’un nouveau genre, comme dans un clapier au fond d’une cour, d’une basse cour la nuit.

Le dispositif scénique est dépouillé, un cadre cerne le vide à jardin et quelques vêtements qu’on distingue à peine, sont suspendus au lointain. Il y a un poste de radio aussi, qui diffuse un tango défraîchi côté cour, et qui par moment laisse échapper des extraits sonores qui m’évoquent une télénovela sirupeuse.

Voici ce qui est proposé, en guise d’intérieur nuit. On ne quittera pas l’intérieur, ni la nuit.

Photo Emile Zeizig

 

 

Deux personnages se découpent, à la chair exposée pour l’un, et devinée pour l’autre, tapi dans l’ombre. Le blafard d’un éclairage minutieux rappelle les teintes crues d’Emile Friant. Le premier corps est là devant nous, actif, gymnaste, le corps fait des mouvements de musculation. Les voix sortent, elles raillent, elles évoquent un quotidien étriqué, petites combines de formulaires, de vie de couple, de vie familiale, de paroles identitaires désaxées, dé-genrées.

Voici deux entités humaines, qui troublent les repères ordonnés : ils sont ensemble, et ne se supportent pas, mais pourtant s’attirent, uniquement sexuels, parce que le sentiment dans ce réduit scénique n’existe pas. Ou semble ne pas exister.

Les attributs physiques sont exagérés, des testicules allégoriques se meuvent sous le buste d’un personnage, des talons aiguilles démesurés s’agitent sous les pas de danse d’un autre. Un homme en talons, une femme en testicules. Les visages sont peints comme ceux des babouins. C’est une anatomie simiesque de l’espèce humaine, guère loin de la bête.

Les éclairages sont inventifs, nouveaux, tout à fait subtils. Ils jouent et sont un troisième personnage, un narrateur technique important qui présente les deux autres.

Ce spectacle est tout à fait nouveau, il honore le texte vitriolé de Luis Enrique Gutierrez Ortiz Monasterio. Le Collectif  l’Organisation signe ici une création audacieuse, intelligente et rare.

Iris Gamme