Origine(s) – Théâtre le Fou, Lyon
Poster un commentaire6 mars 2017 par nouvellesrepliques
Compagnie Les Non Alignés
Création collective : Jérôme Cochet, Arthur Fourcade, Julien Lafosse, Daniel Léocadie et Alexandre Ouzia
Les origines de l’univers et de la vie, puis aussi de nous, humains : voilà un bien vaste sujet. Quelle théâtralité ? Si cette histoire est résolument monumentale, comment la raconter ? La rendre à la portée de tous ? C’est, je crois, le défi fou que s’est lancé la Compagnie Les Non Alignés.
Défi sans l’ombre d’un doute réussi.
Au commencement du spectacle, un groupe de spectateurs/trices assis.es dans le noir de part et d’autre de la salle. Le noir complet, laissant juste le scintillement des étoiles et de la voie lactée projeté au plafond. Un profond silence, le calme. Et même si le cadre est intimiste, il rappelle de près ou de loin l’ambiance d’un planétarium.
C’est de là que tout commence. Il s’enchaine ensuite des figures, des personnages, tous aussi sympathiques les uns que les autres, qui nous embarque dans un voyage interstellaire. Mais aussi dans les mots d’un jeune ado qui est fou amoureux de sa professeure et qui, malgré son désintérêt pour les sciences, trouve la beauté dans ces dernières pour « chopper ».
Origine(s) est à la fois un spectacle drôle et fin. Il nous apprend autant qu’il nous passionne, parce que ce n’est pas parce qu’on arrive à expliquer un coucher de soleil qu’on le rend moins beau : Au contraire.
Toute la vulgarisation scientifique qu’use Origine(s) pour mettre à la portée de toutes et tous ces propos, est rudement bien bâtie. Même Dieu a le droit à sa question. Initié.es et non-initié.es ne peuvent être que ravi.es de l’énergie déployée par des acteurs / artistes / scientifiques investis par leur mission de partage et de questionnement. A aucun moment il n’est question de prosélytisme : au contraire.
Si la beauté se partage, la science aussi. Explications ludiques, rires et réflexions, accessibilité du vocabulaire, des contextes et des idées, sont d’autant de points forts qui font de ce spectacle un objet didactique passionnant et innovant. On voyage entre des ambiances conférencières et des tranches de vie qui trouvent toutes leurs points de rencontre sur les questions macro et microscopiques de l’univers. A quand la théorie du Tout réunissant l’infiniment grand et l’infiniment petit ? Ici, aucune sensiblerie, mais de la sensibilité et du rire aussi. Une chaleur qui donnerait, même au plus réfractaire des élèves de science, envie d’apprendre de nouveau les mathématiques, la physique et tutti quanti : on est très loin de l’hermétisme des sciences ou de la vulgarisation des vendeurs/ses de rêves pseudo-scientifique ou encore autres journalistes sensationnalistes aux exposés creux et pollués d’inepties.
Et on sort du Théâtre Le Fou, plein de rêves, de doutes, de pensées, bref des étoiles plein les yeux : une petite fenêtre s’est ouverte ce soir à une mer de questions que même nos plus imminents chercheurs.euses ne sont pas prêt.es à élucider. Mais on marchera ensuite en se rappelant toute la générosité de ce spectacle qui fait un sympathique coup de pied au derrière du créationnisme, de la science sensationnaliste ou des pensées errantes qui imposent une idée unique de l’existence de la vie. La science, elle, suppose des possibilités, affirme des faits et donne son temps et son sang pour démontrer ses dires.
Pour ma part, passionné de questions liées à l’espace, je retiendrais une chose de cette expérience : je n’ai jamais autant réussi à imaginer comment voyager dans un trou noir ou ce qu’on peut y trouver ou non.
Et si « La beauté est l’exaltation de la vérité » (Saint Paul) ou encore « La beauté sauvera le monde » (Goethe), Origine(s) pourrait faire dire : « Faites de nouveau vivre la science à travers de tel objet artistique et humain ».
Sylvain MENGES